LES MORTS-VIVANTS ! (2 DE 2)
Ici, à l'Accalmie, le pouvoir des intervenants a cependant des limites. Et cette limite, c'est souvent la porte. Au-delà de celle-ci, les gens sont libres de faire ce qu'ils désirent. Lorsqu'ils sortent, les patients signent souvent un contrat de vie. Comme son nom l'indique, il s'agit d'un véritable engagement, par lequel les résidents promettent par écrit de ne pas se suicider !
Johnny a un sourire béat plaqué sur le visage, assis dans une chaise berçante sur la véranda. Aujourd'hui, c'est le plus beau jour de sa vie. Après un silence de 25 ans, cet homme de 40 ans a décidé de dénoncer l'entraîneur de hockey qui a abusé de lui durant son enfance. Il avait 9 ans, la première fois. C'était un petit bonhomme sportif, pugnace, qui, comme tant d'autres, rêvait de jouer dans la ligue nationale...
Assise sur le bout du canapé, la grande Nancy est souvent au coeur des conversations des résidents. A l'Accalmie depuis trois semaines, elle a grandi dans une famille dysfonctionnelle et démunie. Son père était absent, son frère aîné faisait la loi et son oncle l'abusait sexuellement.
''Punching bag'' à l'école, écrasée par sa mère, hyperactive, bipolaire, Nancy a essayée une première fois de se suicider a 14 ans avec des médicaments. Elle en rit presque aujourd'hui, comme d'un vieux mauvais coup d'adolescent.
Il y a trois semaines, elle a passé deux jours dans le coma après une tentative de suicide ratée avec un ''cocktail'' de médicaments. Cette fois, elle a failli réussir. '' Je ne veux pas mourir. Je veux juste arrêter de souffrir. Je ne sais plus à quoi me raccrocher '' laisse tomber Nancy, avant de fondre en larmes.
Au même moment, Natacha, qui elle aussi vit de graves problèmes dévale l'escalier. Elle se précipite dans les bras de Nancy. Enlacée, les deux femmes pleurent ensemble quelques minutes. Un long silence enveloppe la pièce. '' Je vais salir ta blouse '' s'excuse Natacha. Les deux femmes pouffent de rire.
Ces scènes sont fréquentes à l'Accalmie. Ces moments forts, sincères, sont de rares oasis de bonheur dans un océan de chagrin...
Fricot